mercredi, mai 10, 2006

Sans Union le desastre!!

Je retranscris deux tribunes parues dans le monde, une d'Olivier Besancenot et la réponse de José Bové. Il ne manque plus que le PC et les verts montrent leur bonne volonté pour commencer sérieusement un travail d'unité d'une gauche anticapitaliste. Même si je doute de la sincérité de Marie-George Buffet dans ces discours sur l'union Le PC me semble plus parti pour encore une fois devenir l'annexe du PS, se serait la faillite du mouvement du 29 mai et de la contestation contre le CPE. On ne peut pas laisser faire cela, le PC à donc une responsabilité des plus importante, elle doit mettre de coté ces pensées purement électoralistes, pour dynamiser la future union, espoir de la majorité des sympathisants et militants de la gauche.

Marie-Georges, Arlette, José... si on causait ?

la tribune qu’Olivier Besancenot paru dans Le Monde daté du vendredi 28 mars :

" La gauche antilibérale a prouvé sa force depuis un an. Elle doit être présente et unie à l’élection présidentielle. "

Nos noms apparaissent dans les sondages liés à la prochaine présidentielle - quatre noms qui se sont prononcés, ensemble ou séparément, pour un rejet antilibéral et internationaliste du TCE. En moins d’un an, sur le terrain référendaire le 29 mai et sur le terrain des luttes en avril 2006, le libéralisme a subi deux revers, entre le rejet de la constitution et le retrait du CPE. Ces victoires suscitent de grands espoirs chez celles et ceux qui, au quotidien, subissent les effets de l’exploitation capitaliste. C’est une grande leçon de ces derniers mois : la gauche est forte quand elle refuse de disparaître dans le tunnel d’une campagne électorale permanente ; elle est faible quand elle ne s’en remet qu’à l’hypothétique dernier round de l’alternance de 2007. Nos quatre noms ne résument pas seuls toute la diversité qui s’est exprimée dans la campagne du Non de gauche. Pour autant, nous avons des responsabilités communes. Nombreux sont ceux qui veulent savoir si une candidature unitaire est possible et nécessaire. Nécessaire, c’est certain, ne serait-ce que pour répondre à l’aspiration unitaire qui s’est exprimée en ce sens depuis le 29 mai, particulièrement dans les collectifs du même nom. Mais possible ? Les conditions pour aller plus loin ne semblent toujours pas réunies. Pourtant, les obstacles à surmonter pour nous fédérer sont connus de tous : battre la droite et sa politique ; rejeter le social-libéralisme ; ne pas reproduire la stratégie de la gauche plurielle. Battre la droite durablement, c’est bien de le promettre, mais c’est mieux de la combattre dès maintenant. Aujourd’hui, c’est un mouvement d’ensemble qui reste à construire dans l’unité la plus large, sans sectarisme, contre le chômage et la précarité, car la loi « d’égalité des chances » et le grand frère du CPE, le CNE, sévissent toujours. Alors c’est vrai, lutter pied à pied contre la droite, sans repousser à demain la confrontation directe, c’est s’engager à défaire ultérieurement ce qu’elle a produit depuis qu’elle est au pouvoir. Et, pour se débarrasser sur le long terme des méfaits qui s’abattent sur nous en cascade, il faut en finir avec toutes les politiques libérales, même lorsqu’elles ont été menées par la gauche au pouvoir. Bref, battre la droite, sans seulement la « recaler » pour cinq ans, c’est appliquer un plan de mesures d’urgence sociale et démocratique qui permettraient à des millions de personnes de sortir la tête de l’eau. Afin de contester réellement au social-libéralisme son hégémonie sur la gauche, nous devons faire émerger une autre gauche qui refuse les diktats de la finance et de l’Europe libérale. Nous n’avons pas d’autre choix, si l’on veut garder nos droits ou en acquérir de nouveaux, que de défier les privilèges des plus forts. Contrer la mainmise des multinationales sur l’économie et sur nos vies, c’est s’opposer à l’appropriation croissante du fruit du travail de tous par quelques grandes firmes. Impensable, par exemple, de légiférer efficacement pour interdire les licenciements, tant que les pouvoirs publics continueront à ne tolérer « l’ingérence » dans l’économie privée que lorsqu’il s’agit d’inonder les licencieurs de subventions, d’aides directes ou d’exonérations de cotisations sociales, mais jamais lorsqu’il s’agirait de reprendre l’argent public pour que la production continue. Impensable encore d’augmenter les revenus ou d’accorder une allocation d’autonomie pour tous les jeunes en formation sans prendre l’argent sur les profits. Impensable, enfin, d’obtenir une mesure pourtant gratuite, comme le moratoire sur les OGM, sans tenir tête aux multinationales semencières. Une gauche qui ne propose pas de répartir les richesses, en donnant à la population les moyens de les contrôler, est une gauche pleine de belles promesses, mais qui, une fois au pouvoir, n’applique pas une politique de gauche. Enfin, se convaincre que la gauche n’a plus le droit de se tromper dans une nouvelle expérience de la gauche plurielle n’est pas une garantie en soi. La « gauche plurielle » n’est pas une formule, mais une stratégie politique qui demeure celle du PS : satelliser d’autres partis de gauche autour d’accords électoraux pour leur faire assumer les grandes lignes de sa politique. L’espoir consiste donc à s’opposer à la droite et à résister au social-libéralisme, en refusant, par exemple, les accords parlementaires et gouvernementaux faits actuellement par la direction du PS. Cela ne nous marginalise pas. L’idée qu’on pourrait convertir la direction du PS à l’anti-libéralisme ou peser sur les réunions de la gauche au sommet pensant y faire naître l’alternative est une illusion. Il n’y a pas de synthèse possible entre l’anti-libéralisme et le social-libéralisme. D’autant que les institutions de la Ve République, qui empêchent le suffrage universel d’avoir une portée sur les décisions économiques qui touchent à nos vies quotidiennes, sont faites pour qu’à gauche, ce soit bien Hollande qui donne le la et pas Buffet, Royal plutôt que Laguillier, Strauss-Kahn plutôt que Besancenot, et Lamy plutôt que Bové. Alors oui à une candidature unitaire si elle est anticapitaliste. Plus qu’au casting, nous sommes attachés au scénario et au contenu. Deux sont envisageables. Un s’ouvre par la campagne du 29 mai, se poursuit par le soutien aux luttes sociales, déroule un plan de mesures d’urgence pour les classes populaires et la jeunesse, et débouche sur un rassemblement des forces antilibérales et anticapitalistes, internationalistes, féministes et écologistes. L’autre se conclut par la caution de gauche à une nouvelle alternance sous l’aile du PS. Nous ne serons pas du second. Avec un bon scénario, le casting ira de soi. Entre huit candidatures à gauche le 21 avril 2002 et une seule en 2007, il doit y avoir un juste milieu. Une gauche plurielle n°2, à peine relookée, semble devoir se reconstituer. C’est son problème. Les luttes d’aujourd’hui et de demain, elles, méritent mieux. Alors, je crois qu’on aurait besoin de se voir pour causer un peu. À bientôt dans les luttes, c’est sûr... mais pourquoi pas autour d’une bouffe à quatre ? C’est moi qui régale !


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la réponse de Jose Bové :

Point de vue

Olivier, causons, mais vite !, par José Bové

LE MONDE 09.05.06 14h18 Mis à jour le 09.05.06 14h18

Il y a une semaine, dans ces colonnes, Olivier Besancenot a proposé que nous "causions" de l'éventualité d'une candidature unitaire de la gauche "antilibérale", lors de l'élection présidentielle de 2007. Je lui réponds bien volontiers que je suis prêt à causer avec lui comme avec beaucoup d'autres, à la condition toutefois que nous parlions sans arrière-pensées et, surtout, sans préalables. L'unité est une démarche qui, pour réussir et rassembler vraiment, ne supporte pas les considérations tactiques. Elle suppose, en revanche, une volonté qui transgresse les intérêts respectables mais identitaires des formations politiques qui en seraient parties prenantes. L'enjeu, en effet, n'est pas tant une coalition qu'une dynamique électorale.

Où en sommes-nous ? Un an après la victoire du non au référendum sur la ratification du projet de Constitution européenne, et quelques semaines après la mobilisation populaire victorieuse contre le CPE, l'alternative est clairement posée. Doit-on se résigner à ce que nos gouvernants - fussent-ils de gauche - conduisent des politiques d'adaptation à la mondialisation libérale, avec tous les dégâts sociaux collatéraux que l'on connaît ? Ou peut-on, dans les urnes et dans la rue, imposer de nouvelles orientations dont le fondement soit de combattre réellement le chômage, de redonner espoir à toute une génération et d'en finir avec l'exclusion sociale ?

La campagne présidentielle qui s'ouvre est l'occasion d'en débattre pour toutes celles et tous ceux qui sont scandalisés par les parachutes dorés des patrons du CAC 40, qui refusent d'offrir comme seule perspective aux jeunes un avenir de précarité, qui imaginent une société plus solidaire et plus démocratique, bref qui souhaitent remettre le monde en mouvement. Ce débat, me semble-t-il, appelle deux démarches intimement liées. D'une part, il s'agit bien de discuter du fond des choses, autrement dit d'un projet politique qui rompe avec la logique économique libérale et productiviste de ces vingt-cinq dernières années. D'autre part, il est décisif de partager la discussion avec l'ensemble des acteurs du mouvement social et pas seulement avec les appareils politiques.

Le spectacle qu'offre le Parti socialiste, hélas, n'est pas de nature à faire oublier le 21 avril 2002 et ses tristes conséquences. L'unité retrouvée dans la bataille contre le CPE camoufle mal un grand questionnement programmatique. Les sondages les plus flatteurs ne peuvent faire office de projet de transformation sociale. Les socialistes, par exemple, sont-ils tous d'accord pour revenir au contrat unique de travail à durée indéterminée ? Sont-ils tous d'accord pour mettre en chantier une nouvelle République ? Sont-ils tous d'accord pour la régularisation de tous les sans-papiers ? Sont-ils tous d'accord pour prendre acte de la volonté populaire de construire une Europe sociale et démocratique ?

La gauche qui combat la mondialisation libérale, en revanche, paraît plus homogène sur les grands enjeux de 2007. Il faut naturellement le vérifier et le valider. Mais, de la Ligue communiste révolutionnaire jusqu'au Verts, en passant par le Parti communiste, les alternatifs et tous les acteurs des mouvements sociaux, il semble qu'il y ait un large consensus aujourd'hui sur un programme de rupture avec la logique du tout-marché, du tout-libéral. Nous sommes, en effet, à peu près tous d'accord pour proposer un plan d'urgence et d'intégration sociale pour les plus démunis, pour assortir le contrat de travail d'une sécurité sociale professionnelle tout au long de la vie, pour considérer que les salariés ne doivent plus nécessairement être la variable d'ajustement pour les actionnaires, pour réclamer la proportionnelle aux législatives et une profonde réforme des institutions, pour exiger que les prochaines élections européennes soient "constituantes", pour imposer un moratoire sur les OGM et le projet d'EPR.

Ce large consensus ne suffirait cependant pas à dynamiser une candidature unitaire qui ne serait pas portée par toutes les composantes du mouvement social. Je comprends bien que Marie-George Buffet s'imagine la mieux à même de fédérer la gauche du "non", qu'Olivier Besancenot rêve d'incarner la "gauche anticapitaliste" ou même que la gauche des Verts ait tenté de promouvoir une candidature labellisée "gauche radicale". Mais la légitimité de l'unité ne peut se passer des acteurs syndicaux, associatifs ou "mouvementistes" qui espèrent et réclament, d'une manière ou d'une autre, un autre débouché électoral aux luttes que la dispersion entre de multiples candidatures à la gauche du PS.

C'est de cela qu'il convient désormais de discuter tous ensemble. L'un des enjeux majeurs du cycle électoral qui vient, ne l'oublions pas, est de briser la spirale de l'abstention et du découragement dans les couches de la population les plus exposées à l'exclusion ou à la souffrance sociale. Il n'y aura pas de remobilisation électorale sans processus démocratique de discussion et de conviction dans les milieux populaires, à commencer par les banlieues. A nous d'imaginer le chemin d'une proposition puis d'une désignation, quel que soit notre candidat ou notre candidate, dont le point d'aboutissement ait une portée symbolique autrement plus forte que le vote des seuls adhérents d'un parti.

Voilà ce dont je suis prêt à discuter avec Olivier et beaucoup d'autres, en ayant la ferme intention d'être disponible, le cas échéant, pour soutenir de toutes mes forces la candidature unitaire qui apparaîtrait la meilleure. J'y ajoute, toutefois, deux conditions. D'abord je souhaite qu'il s'agisse bien d'une démarche collective de campagne, bousculant les règles de l'aventure individuelle et donnant la priorité au collectif plutôt qu'à la starisation. Ensuite je considère que l'ennemi principal doit bien être désigné comme la droite et l'extrême droite, et non pas, indirectement ou subrepticement, comme le Parti socialiste. Si nous sommes d'accord, il n'y a plus beaucoup de temps à perdre. Causons, mais vite !

José Bové est membre de la Confédération paysanne.

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